07 février 2013

Wanted : Mokhtar Belmokhtar



La punition écrasante du borgne

De hauts responsables militaires et des services de renseignement américains envisagent d'inscrire sur une liste secrète des personnes à "tuer" le nom de l'Algérien Mokhtar Belmokhtar, qui a revendiqué l'attaque contre le site gazier d'In Amenas, selon le Wall Street Journal. Ajouter son nom à cette liste impliquerait une expansion militaire importante des États-Unis dans le nord-ouest de l'Afrique, à travers une extension des frappes de drones et des opérations de contre-terrorisme.

A Tombouctou, au temps du triomphe des islamistes et de la Charia, un émir redouté et secret contrôlait un camp d'entraînement pour jeunes recrues, proche de la ville. Taille moyenne, sec, barbu, les cheveux bouclés, la tête enveloppée dans un chèche noir. Un regard sombre. L'œil gauche perdu dans une embuscade en Afghanistan semblait immobile avec la joue labourée par une vilaine cicatrice laissée par l'éclat d'obus qui l'avait mutilée.

Mokhtar Belmokhtar. L'homme est froid, sans état d'âme.  Deux surnoms : "Nhenn-Ouara", le borgne et Sultann Malboro, du nom des cigarettes pour lesquelles il s'était imposé comme contrebandier unique dans le nord du Mali et jusqu'à Al Troun, dans le sud libyen. Il détenait aussi le monopole du trafic de drogues dures acheminées par cargos d'Amérique latine, puis à travers la Guinée Bissau, par rames de 4 x 4 et d'inoffensives caravanes de chameaux jusqu'à ses repaires dans le nord du Mali. Parfois même, des chargements de coke pure de Colombie étaient transportés par de vieux bimoteurs sur l'aérodrome de Tessalit, proche de la frontière algérienne.

Autre source de gros profits, le nouveau trafic d'esclaves, les prises d'otages qui se chiffrent par dizaines de millions de dollars.

A l'annonce de l'intervention française au Mali, et la déclaration de Laurent Fabius, mentionnant l'autorisation de survol de son territoire accordée aux Rafale des forces armées françaises par l'Algérie, Mokhtar Benmokhtar disparaissait soudain de Tombouctou. Nhenn-Ouara (en arabe, l'œil qui regarde derrière) est remonté vers le nord sur Kidal et son sanctuaire installé dans le massif inexpugnable de l'Adrar des Ifoghas. Rien ne filtre de ses interventions. Mais dans le plus grand secret, il prépare "un grand coup international".

On a écrit qu'il était devenu "ivre de rage" en apprenant les facilités de survol concédées aux avions français. Faux. Maître de ses nerfs, endurci par des années de combat et de désert, il réfléchit. En fait, il va saisir cette opportunité pour amplifier l'impact médiatique provoqué par l'acte de guerre qu'il projette.

Le mercredi 16 janvier à l'aube, un commando de 40 hommes entassés sur des 4 x 4 et lourdement armés attaquent et occupent en moins d'un quart d'heure l'énorme complexe gazier d'In Amenas, à 1.500 km au sud d'Alger. Sur le site, 800 personnes sont au travail, parmi lesquelles plus de 150 étrangers, et constituent l'espérance d'une formidable razzia (plus d'un demi-milliard de dollars de rançon). Les chefs du commando exultent. Ils ont tout prévu : la mise en alerte de l'opinion internationale par une agence de presse mauritanienne qui annonce l'investissement des champs de Tiguentourine par un groupe d'assaut islamiste venu de Libye. Et la télévision qatarie Al Jazeera qui relaye les propos de Joulaybib, le bras droit d'un chef de l'Aqmi. Deux heures plus tard, le chef du commando, Al Barraa, prend la parole sur Al Jazeera sans que personne ne s'interroge sur ces curieuses accointances.

La suite est connue. La réaction violente d'Alger en état de légitime défense. L'extermination du commando. La logique opérationnelle implacable et définitive. Et ce tranchant coup d'arrêt qui court désormais sur l'infinie des dunes et des djebels qui déchirent le ciel : "C'est fini. La caisse est fermée. On ne paie plus de rançon."

Pour Mokhtar Belmokhtar, l'aventure se solde par une terrible punition. Ironie du sort, le survol de l'Algérie par les avions français, prétexte de son coup de folie, n'a pas eu lieu. Les appareils français sont passés par l'Espagne et le sud marocain.
P.Dt. pour 24heuresinfo

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